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16/02/2008

Les grands-parents d´Anita

Les grands-parents d´Anita vivent dans une toute petite maison au fond d´un jardin, avec un seul étage. Les murs du salon sont pleins de cadres: des diplômes, deux reproductions de peintures de Venise, des vieilles photos. Sur la table basse, un bouquet technicolor de fausses fleurs s´assortit avec les tissus rouges brillants des canapés, et la télévision en plastique orange des années soixante, avec des antennes supersoniques, qui vaudrait une fortune chez un antiquaire du design. Anita nous fait écouter quelques disques vinyles de musique traditionnelle andine et d´une chanteuse équatorienne. Le grand-père, qui n est pas encore la, soigne sa collection, et je le comprends. Les trente-trois tours, c est introuvable ici. Il parait que le grand-père est parti explorer un endroit de Quito qu´il ne connait pas, parce que maintenant, il veut découvrir tout ce qu’il ne connait pas. La grand-mère attaque la conversation d un quart de tour. Son débit est impressionnant. Jose a du mal a tout me traduire tant elle va vite, et en plus elle fait des jeux de mots. Lorsqu’ arrive le grand-père, elle lui dit:

Ah, je croyais que tu étais parti pour toujours. Et tu étais ou? Tu es allé suivre une fille et faire comme les chats: miaaa, miaaa! Es miaaa! Qui signifie: c est la mienne. Rafaela lui demande si elle peut prendre des bonbons. Elle lui répond: oui, oui sers-toi autant que tu veux. Et ils sont ou les bonbons Abuelita, demande Rafaela. Au magasin! Répond la grand-mère. Aussi elle commence a se lancer dans une très grande discussion, enfin, plutôt un monologue en nous regardant Jose et moi. Comme j ai les cheveux clairs et les yeux bleus, elle croit que je suis évangéliste, car ici les évangélistes qui font du porte à porte sont souvent comme moi. Alors elle se lance dans un plaidoyer pour le catholicisme. D ailleurs c est écrit sur la porte: famille catholique, ne pas insister. Avant de partir, le grand-père dit à Anita de ne pas maltraiter sa petite fille, sur un ton très menaçant. La Omi est comme ma fille, si tu la maltraites, je t´ enverrais en prison. Il en pleure presque en lui disant cela. Anita lève les yeux en soupirant, mais ne dit rien. C est tellement surprenant pour nous qui avons vécu quinze jours chez Anita d entendre cela, car on sait qu’elle s occupe parfaitement bien de ses filles.

Je suis revenue un jour seule avec Anita et ses filles. Sa sœur et son fils, ainsi que sa mère étaient aussi la. La grand-mère me parlait tellement que toute la famille lui a dit arrêtes grand-mère, elle ne comprend rien! Et ma foi, c´était bien vrai. Néanmoins je ne voyais pas le moindre inconvénient à laisser la grand-mère me parler sans fin, vu que je n´étais pas non plus capable de discuter de quoi que ce soit avec qui que ce soit. Mais a table, elle a recommence, et la, c est le grand-père qui lui a dit d´arrêter sur un ton autoritaire. Elle n a plus siffle mot et est sortie de table, terriblement vexée. Apres le repas, tout le monde est sorti au jardin. J´étais encore assise dans le salon. Lorsque la dernière personne a franchi la porte, la grand-mère qui avait compris la chance qu’elle avait là, m´a regardé avec des étincelles dans les yeux, et, sans attendre une seconde a recommence son monologue. C´était, du point de vue de l´expressivité, fort captivant.

A un moment donne, lorsque nous étions a table, j ai entendu la mère d Anita prononcer mon prénom, et plus tard dans la phrase a la quelle je ne comprenais rien, le prénom de Jose. Elle regardait Omi, qui d un seul coup m a regarde d´un air très étonné. Je ne savais pas si son expression signifiait que ce que sa mère disait de nous était surprenant, ou bien que sa mère était en train de raconter n´importe quoi. La suite me prouva qu’il s agissait de la seconde impression. Anita nous raconta plus tard que sa mère croyait que j´avais le nez rouge parce que la famille de Jose, qui ne m´acceptait pas, me faisait de la sorcellerie. On a failli, ce soir là, mourir de rire dans le couloir d´Anita. N´empêche qu’il va quand même falloir que je m´ achète de la crème solaire.

Commentaires

Point de vue anthropologique, c'est riche: ne pas comprendre ce que les gens disent force a observer autrement, et a comprendre par notre humantie plutot que par les mots! Mais dis donc, tu me fais bien rire aussi! merci! Blandine

Écrit par : Blandine | 29/03/2008

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