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02/03/2008

Histoires de bus

 J´ai vu défiler dans les bus des vendeurs de journaux, de papier essuie-tout, de chips de patates et de bananes, de caramels, de glaces, de gâteaux et de pinces a cheveux et de poudre magique pour se nettoyer le corps par un suppose étudiant en médecine. Dans le trolleybus, on a entendu un aveugle chantant "Eraaa, come la primaveraaa", que je connais de la bouche de José. Il était un peu gros, avait une belle voix et passait dans l´allée avec un magnétophone qui l accompagnait. On a aussi vu une jeune colombienne avec un bébé qui faisait la manche. Mais la manche, ca ne marche pas très fort, sauf si la personne parle bien, et encore. Il n y a pas beaucoup de gens qui font la manche comme ca, tous ceux qui arpentent les transports en commun ont toujours quelque chose à vendre. C´est pratique, on peut faire ses courses pendant les trajets, et manger si on a faim. Les parisiens devraient y songer, avec tout le temps qu’ils passent dans le métro. Les chauffeurs de bus ne refusent jamais l´entrée a un vendeur ambulant. Mais ça, ça serait difficile en France, non ?

 Aussi, les vendeurs des bus parlent parfois des raisons qui les amènent ici. Un jour, en fin d après-midi, le long de l´avenue Mariscal Sucre, qui traverse la ville du nord au sud, un homme est monté dans le bus avec un petit garçon qu’ il tenait d un bras, et dont on ne en voyait que le dos. Il parlait fort, avait des yeux bleus, et postillonnait beaucoup car il lui manquait cinq ou six dent à la mâchoire du bas. Il s´est retourné pour parler du garçon qui, je suppose était son fils a cause des mêmes yeux bleus, en disant « este creatura, blablablabla »… Le petit garçon qui paraissait avoir 6 ans, suçait tranquillement une glace en bâtonnet, et a salué tout le bus avec une figure angélique au moment ou son père parlait de lui. Le bus était en train de passer les rues les plus escarpées de Quito, comparables au col du Puy-Mari, à une allure pas tellement adaptée à la situation. Aussi l´homme qui n´avait qu’une main pour se tenir avait beaucoup de mal à garder son équilibre. Il avançait, reculait, et enfin essayait de s´attraper de sa main libre à une barre de l´allée tout en tenant le garçon de l´autre. Mais la barre était déboitée, et une autre fois il perdit son équilibre. A nouveau il reculait, avançait, et encore attrapait cette barre mal fixée et encore perdait son équilibre. Pendant tout ce manège, il parlait, de ce que j´ai compris, de la mère de l´enfant, de drogue, d´hôpital, et toujours de « este creatura », tout en montrant son fils, en ponctuant son intervention de nombreux « gracias a Dios » en levant les yeux au ciel, puis a montré les fesses de l´enfant en parlant d´incontinence. Les gens du bus étaient très attentifs à cette longue histoire, et commençaient à lui acheter un paquet par-ci, un paquet par-là, de ce qui me semblait être des sacs poubelle. Ca marchait bien. Il en vendait un ou deux, puis continuait à parler en disant « grâce a votre aide », et « grâce à Dieu » et beaucoup d´autres choses que je ne comprenais pas. Pendant ce temps, j´ai remarque une femme assise a cote du monsieur qui parlait, qui brusquement s´était retournée vers lui et l enfant: la glace du petit lui dégoulinait dessus. Mais le père, ayant le dos tourné, ne le voyait pas, et l´enfant continuait de sucer sa glace fondante avec enthousiasme.
En sortant, le père s´est retourné une nouvelle fois, et l´enfant a salué l´assemblée du bus en faisant claquer une petite bise dans l´air. La femme qui était assise devant moi, émue, a donne une pièce au père en refusant les sacs en plastique. A peine descendus, les passagers faisaient encore des commentaires, de ce que j interprétais comme « Vous vous rendez compte … »
Immédiatement, un noir leur a succédé. Il est monté avec un pot en plastique dont il faisait goûter le contenu à chaque passager qui en voulait bien: des petites boulettes noires, vraisemblablement artisanales. Il s´est appuyée sur  une barre de l´allée centrale. La barre s´est déboitée et lui a fait perdre son équilibre. D´un geste sur et énergique, il l´a remise en place, et a continué sa tournée.

 Un autre jour, en allant au musée Inti Nan, un peu au nord de Quito, Jose m´a traduit l´histoire suivante qu’un homme, à qui il manquait un bras racontait aux passagers du bus.
« Mesdames et messieurs, je vous remercie de me consacrer un peu de temps. Il se trouve qu’avant, de ma vie, jamais je ne montais dans un bus. Même pas en tant que passager. J´avais une voiture, je gagnais bien ma vie: j étais médecin dans un hôpital. Aussi, j´avais deux bras. Apres mon accident, l´assurance ne m´a jamais rien payé. Mais la vie est ainsi, et autour hui, je vends des bonbons. J´ai des bonbons a la menthe, au melon, au citron, à la narancilla. Cinq pour vingt-cinq centimes. Voulez-vous des bonbons ? »

20:58 Publié dans Voyage | Lien permanent | Commentaires (0)

30/01/2008

Quito, La cabaña de Papa Segundo, les chiens et la laitière

 Arrivée à Quito

Aéroport de Quito. Aterrissage en plein centre ville. On monte dans un taxi jaune d´oeuf, couleur de tous les taxis de Quito, me précise José. Pas de ceintures, ça sera un peu plus sportif encore et c´est parti. José me montre une grande maison verte juste en face de l´aéroport, c´est celle où vit son père.  Et au coin de la rue qui suit, il me crie : regarde, regarde, c´est lui mon père ¡ Je me colle à la fenêtre, pas moins impressionée qu´une poule ayant trouvé un couteau par l´indien aux longs cheveux très blancs qui se tient prêt à traverser la route. Le papa de José.

Le taxi claxonne très sereinement à tout va, comme il se doit. Le slalome est de rigueur dans chaque rue de la ville. José prend quelques nouvelles de la politique auprès du chauffeur qui soupire "le pays va mal, mal..." Le président veut rendre obligatoire la déclaration des revenus, et donc les impôts, pour les personnes gagnant plus de 7000 dollars par ans. Somme considérable pour un équatorien (le salaire d'un employé est de 150 dollars mensuels ). Il dit que le gouvernement doit d´abord construire des écoles et des hôpitaux, et ensuite il veut bien payer. Car, poursuit-il, ce sont les riches qui font tout dans ce pays. Pour lui, la politique de Correa, qui voudrait réduire les fossés sociaux, fait courrir le pays à sa perte. L´ avocat de Correa vient d´être assassiné il y a quelques jours. Les propositions qu´a reçues José de travailler au ministère de la culture finissent de le laisser hésitant.


 Las cabañas de Papa Segundo 

Après notre arrivée chez Anita, à Gataso, quartier populaire du Sud de la ville, première expédition pour manger. Il y a des petits magasins partout, et on trouve de tout partout. Mais José rêve d´une " sopita ", la soupe équatorienne avec mille choses dedans. On croise une petite chèvre qui broute tranquillement devant une maison, et au bout de la rue, on s´arrête devant une grande cabane en bois, La Cabaña de Papa Segundo. José demande au patron, un indien aux cheveux courts d´environ 60 ans, ce qu´il peut servir, en précisant que c´est mon premier jour ici. A ce que je comprend la réponse est à peu près " rien de bon pour elle ici" et il nous indique une autre adresse où je pourrais manger des choses qui me plairont. Mais la cabane me plaît tellement, que j´insiste pour rester. On s´attable devant le rouleau de câbles électriques en bois qui nous sert de table et Papa Segundo part nous préparer qulque chose de "pas trop indien". En attendant, il nous pose sur la table une calebasse de chicha, la boisson fermentée traditionnelle des indiens, où flotte une petite calebasse pour boire. On en prend un peu, mais avant de boire, on offre la chicha à Pachamama, c´est à dire la Terre, en versant un peu de boisson par terre. Devant nous, une femme discute assise à l´arrière d´un pick-up avec deux hommes, qui boivent aussi de la chicha. Dans la rue, deux cantonniers construisent un trottoir. Un petit garçon joue à côté d´eux, sans doute le fils de l´ouvrier. On se rend compte que le deuxième ouvrier est une femme. Peut-être est-ce la famille entière? Au moins, pas de souci de baby-sitting et de crèche ici ¡ Papa Segundo nous amène un plat de chocho tostado, du maïs grillé avec des fèves blanches, et de l´avocat. C´est délicieux. Je suis épatée qu´un home de cet âge cuisine aussi bien. Il précise à José qu´habituellement, le plat se sert dans un plat en terre, mais puisque je suis une gringa, il a sorti une assiette en porcelaine ¡ Il demande à José s´il est ingénieur ou informaticien, enfin, que fait-il donc de prestigieux pour avoir attrapé una gringa? José répond, " Non, je fais rien de spécial, je fais de tout, et elle m´ aime comme ça". Là, il a l´air carrément impressionné, et je crois que je viens de gagner la grâce divine. "Vaya con Dios" me dit-il en signant une croix devant moi. Comme quoi, Pachamama et le Bon Dieu font bon ménage chez Papa Segundo ¡
José a toujours envie de sopita, alors on s´apprête à s´en aller, mais Papa Segundo nous dit que pour trois dollars, il nous fait aussi la sopita. Et on le regrettera pas. La sopita est délicieuse, avec deux ou trois viandes différentes, de l´avocat, des oignons, du coriandre frais. Par dessus le marché, il m´offre une petite assiette de riz avec du porc, qui se mange après la soupe. Au bout de la rue, une montagne surplombe à quelques kilomètres de là. Quito est entourée de belles montagnes rondes, hautes et très vertes. Les dernières maisons de la ville viennent s´ échouer à leurs pieds.

Deuxième tour de taxi 

Anita qui vient juste d´enménager dans la maison où elle nous accueille, nous précise qu´elle n´a pas encore eu le temps d´acheter un matelas pour notre lit. Elle nous enmène en taxi pour en acheter un maintenant. On se pose devant la maison et on fait des grands signes à tous les taxis qui passent. Là, je comprends que le premier chauffeur était hyper zen en voiture. Après six mois passés en France, José comprend qu´il commencait à s´habituer à une conduite un peu plus rectiligne, mais à Quito, ça serait pas très agréable de conduire comme ça.

José pose encore la même question au chauffeur "Comment va le pays?". Celui-ci fait des éloges de Correa, tout va mieux. Il est content de la loi sur la déclaration des revenus, parceque les riches vont enfin payer des impôts. Et si le chauffeur de taxi de l´aéroport n´est pas content, dit-il, c´est normal, car être chauffeur de taxi à l´aéroport, c´est une place en or.

Les chiens de Quito et la laitière

Le hurlement d'un chien qui vient de se faire taper par une voiture à côté du cyber-café où j'écris en ce moment me sort brutalement de l´écran... C´est comme ça ici, il y a des chiens partout partout. Ils vivent dans la rue, sur les terrasses des maisons, glanent de la nourriture sur les trottoirs et dans les terrains vagues, dorment roulés en boule au bord de boulevards pas moins bruyant que la Canebière. Hier, un petit garçon de trois ans, donnait un gros biberon à trois chiots minuscules devant chez lui, sur le trottoir. "Lui veut pas têter" nous a t-il dit en levant les yeux vers nous, alors qu´un des chiots lâchait la tétine qui arrosait le trottoir.

Un peu plus tard, s´ arrête un pick-up avec une femme à l´arrière et pleins de gros bidons de lait, la voiture  claxonne et la jeune femme du cyber-café sort pour acheter du lait dans un sac en plastique. Le lendemaim, José me sort de cette poésie qui me ramenait au doux souvenir des boulangers ambulants ou des bidons de lait tout frais de chez Pierre... en disant que tu peux acheter du lait comme ça seulement si tu connais bien le vendeur, autrement, on te rajoute de l´eau avec ¡