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19/02/2008

Anita la dentiste

411501520.jpgLes quinze premiers jours, nous avons été hébergés chez Anita, une amie de José qui vit avec ses deux filles, Omi et Rafaela. Son cabinet est dans sa maison, ce qui fait qu´elle peut travailler tout en s´occupant de sa plus jeune fille. La porte d´entrée est toujours grande ouverte, il y a dans la salle principale quelques cloisons en plastique coulissant qui délimitent la salle d´attente, qui est aussi le salon, du cabinet d´Anita. A droite, dissimulé derrière une autre cloison, il y a un bureau en bois, qui est aussi la table à manger. Les patients ne prennent des rendez-vous que lorsqu´ils ont besoin de venir un jour férié ou un dimanche. Autrement, ils arrivent souvent après la journée de travail. Le matin, le cabinet est souvent vide. Du reste, la salle d´attente sert plutôt à s´asseoir qu´à attendre, car même lorsqu´il y a un patient dans le cabinet, la porte reste toujours ouverte, et la famille vient à la porte pour assister à l´opération ou discuter. Parfois, c´est Rafaela qui vient s´asseoir avec sa mère qui soigne un patient dans le cabinet. Tout est ouvert, et il se peut que, de la cuisine, vous entendiez les gémissements d´un patient tout en buvant votre café.

L´âne et le café

On poursuit notre quête de logement dans le premier quartier de notre choix. La même femme qui nous a fait visiter un appartement nous reconnait et nous introduit chez tous ses voisins qui ont quelque chose à louer. En ressortant, elle me dit: "si tu viens habiter là et qu´on devient amies, je te ferais manger de l´âne". L´idée ne m´enchante pas réellement, mais par politesse, je lui souris gentiment. Ce jour là, on ne trouve rien non plus. Mais en rentrant je dis à José, bon, au moins, si on trouve quelque chose là-bas, j´aurais une amie qui me fera manger de l´âne. C´est un peu bizarre, mais bon... Il me répond que c´était une blague. "Personne ne mange de l´âne ici! Ca serait tellement bizarre pour nous aussi"... Je ne comprend pas l´humour équatorien. J´explique à José que c´est pas tellement facile de comprendre ça, étant donné qu´ils mangent aussi des cochons d´Inde. Pour moi, ça ne fait pas de différence. Enfin, c´est juste maintenant que ça me fait rire. Quelques jours plus tard, nous sommes allés manger en ville. Le serveur me demande si je veux un café américain, ou un café italien. Je lui demande qu´est-ce qu´un café américain. Il me répond: " c´est un café fait avec une machine". Là, je rigole, et lui dis "ah, bon?" car je me doute bien que c´est un café fait avec une machine. Après avoir commandé un café américain-fait-avec-une-machine, je dis fièrement à José que je commence à comprendre l´humour équatorien. "Mais quel humour? me dit- il. Je crois que le serveur était très sérieux quand il t´a dit ça". Je ne l´ai cru que quelques jours plus tard, au moment où j´ai commandé un café en ville, et où la serveuse a posé devant moi une tasse d´eau chaude et un pot de café liophilisé. Ici, c´est ça un café normal, et même, le café liophilisé coûte beaucoup plus cher que le café moulu qui est d´ailleurs un peu difficile à trouver. Au pays des caféiers, c´est Nescafé le roi.

Road movie pour un appartement

On est retourné dans le quartier de Reino de Quito. C´est plus fort que moi, il me faut des montagnes, et un peu d´air. José demande à deux femmes qui se réchauffent près d´un feu dans la rue s´il y a un appartement à louer. L´une d´elle nous propose d´aller visiter celui que son fils vient de rendre, et dont elle a encore les clés. C´est un très grand appartement avec deux ou trois chambres. En Equateur, pas de petites mesures. Les couples doivent se mettre à faire des enfants les uns à la suite des autres, car il n´y a pas d´intermédiaire entre une chambre et un appartement avec trois ou quatre chambres. L´appartement est carrelé partout, par terre, sur les murs, avec des couleurs allant du jaune au marron, en passant par le vert. Vous n´imaginez pas mon bonheur. Les équatoriens développent une passion immodérée pour le carrelage. Il en mettent partout, même sur les façades des maisons, sur les trottoirs. Moi aussi j´aime bien le carrelage, mais enfin, pas tellement en imitation faux-marbre bleu et marron, ni avec des légumes. Enfin, le fait que ce ne soit pas la propriétaire qui nous fasse visiter nous donne une idée des vrais prix. Entre temps, l´autre appartement qui nous plaisait bien a un peu augmenté. De dix dollars. Encore raisonnable, mais ça nous énerve un peu.

On tente notre chance dans un tout autre quatier de Quito, toujours en bordure de ville. A Guapullo, au Nord de la ville, à l´est. Là, on se met d´accord sur la technique suivante: José va de l´avant, demande, et visite tout seul. Il trouve un grand appartement à 100 dollars. Pas cher pour la taille, mais trop grand pour nous, il demande s´il y a plus petit. Avant que la propriétaire ne lui fasse visiter deux petites chambres, elle s´absente pour aller répondre à la voisine. José comprend que la voisine bien avisée vient la prévenir qu´il est avec une étrangère. Elle était penchée à la fenêtre quand on est arrivés. En revenant, elle lui demande: et de quel pays vient votre femme? De France? Ah... Combien ça fait les deux chambres, demande José. 80 Dollars, répond sans hésiter la propriétaire. A peine moins cher que l´appartement de quatre chambres! Décidément, je coûte vraiment très cher.

 

 

16/02/2008

Les grands-parents d´Anita

Les grands-parents d´Anita vivent dans une toute petite maison au fond d´un jardin, avec un seul étage. Les murs du salon sont pleins de cadres: des diplômes, deux reproductions de peintures de Venise, des vieilles photos. Sur la table basse, un bouquet technicolor de fausses fleurs s´assortit avec les tissus rouges brillants des canapés, et la télévision en plastique orange des années soixante, avec des antennes supersoniques, qui vaudrait une fortune chez un antiquaire du design. Anita nous fait écouter quelques disques vinyles de musique traditionnelle andine et d´une chanteuse équatorienne. Le grand-père, qui n est pas encore la, soigne sa collection, et je le comprends. Les trente-trois tours, c est introuvable ici. Il parait que le grand-père est parti explorer un endroit de Quito qu´il ne connait pas, parce que maintenant, il veut découvrir tout ce qu’il ne connait pas. La grand-mère attaque la conversation d un quart de tour. Son débit est impressionnant. Jose a du mal a tout me traduire tant elle va vite, et en plus elle fait des jeux de mots. Lorsqu’ arrive le grand-père, elle lui dit:

Ah, je croyais que tu étais parti pour toujours. Et tu étais ou? Tu es allé suivre une fille et faire comme les chats: miaaa, miaaa! Es miaaa! Qui signifie: c est la mienne. Rafaela lui demande si elle peut prendre des bonbons. Elle lui répond: oui, oui sers-toi autant que tu veux. Et ils sont ou les bonbons Abuelita, demande Rafaela. Au magasin! Répond la grand-mère. Aussi elle commence a se lancer dans une très grande discussion, enfin, plutôt un monologue en nous regardant Jose et moi. Comme j ai les cheveux clairs et les yeux bleus, elle croit que je suis évangéliste, car ici les évangélistes qui font du porte à porte sont souvent comme moi. Alors elle se lance dans un plaidoyer pour le catholicisme. D ailleurs c est écrit sur la porte: famille catholique, ne pas insister. Avant de partir, le grand-père dit à Anita de ne pas maltraiter sa petite fille, sur un ton très menaçant. La Omi est comme ma fille, si tu la maltraites, je t´ enverrais en prison. Il en pleure presque en lui disant cela. Anita lève les yeux en soupirant, mais ne dit rien. C est tellement surprenant pour nous qui avons vécu quinze jours chez Anita d entendre cela, car on sait qu’elle s occupe parfaitement bien de ses filles.

Je suis revenue un jour seule avec Anita et ses filles. Sa sœur et son fils, ainsi que sa mère étaient aussi la. La grand-mère me parlait tellement que toute la famille lui a dit arrêtes grand-mère, elle ne comprend rien! Et ma foi, c´était bien vrai. Néanmoins je ne voyais pas le moindre inconvénient à laisser la grand-mère me parler sans fin, vu que je n´étais pas non plus capable de discuter de quoi que ce soit avec qui que ce soit. Mais a table, elle a recommence, et la, c est le grand-père qui lui a dit d´arrêter sur un ton autoritaire. Elle n a plus siffle mot et est sortie de table, terriblement vexée. Apres le repas, tout le monde est sorti au jardin. J´étais encore assise dans le salon. Lorsque la dernière personne a franchi la porte, la grand-mère qui avait compris la chance qu’elle avait là, m´a regardé avec des étincelles dans les yeux, et, sans attendre une seconde a recommence son monologue. C´était, du point de vue de l´expressivité, fort captivant.

A un moment donne, lorsque nous étions a table, j ai entendu la mère d Anita prononcer mon prénom, et plus tard dans la phrase a la quelle je ne comprenais rien, le prénom de Jose. Elle regardait Omi, qui d un seul coup m a regarde d´un air très étonné. Je ne savais pas si son expression signifiait que ce que sa mère disait de nous était surprenant, ou bien que sa mère était en train de raconter n´importe quoi. La suite me prouva qu’il s agissait de la seconde impression. Anita nous raconta plus tard que sa mère croyait que j´avais le nez rouge parce que la famille de Jose, qui ne m´acceptait pas, me faisait de la sorcellerie. On a failli, ce soir là, mourir de rire dans le couloir d´Anita. N´empêche qu’il va quand même falloir que je m´ achète de la crème solaire.